A Paris, la scène drag fait flamboyer la mode
Pas de culture drag sans tenues de scène extravagantes : dans une petite exposition, l'Ecole supérieure des arts et métiers de la mode met à l'honneur, jusqu'au 27 février, le travail de trois talentueux anciens élèves arboré par des «queens» de l'émission «Drag Race France».Kam Hugh, découverte dans la première saison de «Drag Race France», porte une robe sirène rose bonbon confectionnée par Miss Boo, passée par Esmod en 2016. (Jean-Ranobrac)
La rue Catherine de La Rochefoucauld dans le IXe arrondissement de Paris n'avait pas vu pareil déploiement d'extravagance depuis près de deux siècles. Le quartier de la Nouvelle Athènes, ancien territoire des artistes et partisans du romantisme français désormais fort bourgeois, a servi de décor, jeudi 6 février, à un rassemblement de sympathisants de la culture drag invités à découvrir une petite exposition organisée par l'Ecole supérieure des arts et métiers de la mode (Esmod) . «L'Art du drag : trois regards mode»se concentre sur trois silhouettes réalisées par trois anciens élèves invités à partager leur expérience dans des vidéos d'une dizaine de minutes.
Présentés dans l'atrium d'un impressionnant bâtiment datant du début du XXe siècle, les ensembles incarnent différentes facettes du genre que Drag Race France a popularisé ces dernières années : Miss Boo joue la carte de l'humour, Kitty Space, révélée dans la saison 2 de l'émission, évoque ses origines asiatiques et françaises, Maxime Arthur (promo 2017) et sa marque «drapeau blanc» se concentrent sur le reveal, l'art de révéler par surprise une voire plusieurs autres tenues lors d'une performance. Ce dernier a confectionné une tenue à deux facettes, robe drapée et son corset surmonté d'un torse pailleté rose poudré, portée par Cookie Kunty, figure de la scène drag.
«Le reveal est une catégorie à part entière de la performance drag», précise Jean-Baptiste Pennel, chargé de la création visuelle à Esmod, qui a suggéré l'idée de cette mini-exposition à Sylvie Marot, directrice du pôle «art, culture, héritage» de l'école, pour «s'adresser aux nombreux étudiants issus de la communauté LGBTQIA + de l'école, rappelle-t-il. Le reveal, qui signifie ici transformation, consiste pour la drag en train de performer, le plus souvent au cours d'un playback qu'on appelle '' lip sync, à tirer sur un élément qui transforme sa tenue en tout autre chose.»
Minaudière
La robe créée par Miss Boo, passée par Esmod en 2016, rend hommage au petit matin qui chante. Portée par Kam Hugh, découverte dans la première saison de Drag Race France, la robe sirène rose bonbon, inspirée du quadrillage des couettes molletonnées, a été réalisée dans le cadre d'un défilé dans l'émission qui avait pour thème «lendemain de soirée». Elle est surmontée de satin rouge et agrémentée d'une minaudière pilule de la créatrice Yaz Bukey. Kam Hugh porte une impressionnante perruque confectionnée par Christophe Mecca.
Le look de Kitty Space (diplômée d'Esmod en 2016), révélée par l'émission de France télévision en 2023, fait, lui, référence à la double culture de la performeuse : «C'est vraiment moi, dans le sens où je suis d'origine vietnamienne et que j'ai été adoptée par une famille française. Je voulais mêler les pagodes asiatiques comme celles qui apparaissent sur la perruque créée par le perruquier The Pretty Wig, les dragons qu'on trouve dans plusieurs pays d'Asie, le rouge qui représente le bonheur en Chine, et l'or, symbole d'une opulence très Versailles, les robes à paniers du XVIIe siècle et d'autres à faux culs. J'aime les lignes marquées, très Mugler .» Les robes des trois «esmodiens» sont visibles gratuitement jusqu'au 27 février.
«L'Art du drag : trois regards mode», à l'Esmod, 12, rue Catherine de La Rochefoucauld, 75009 Paris, jusqu'au 27 février.

Commentaires0
Veuillez vous connecter pour lire ou ajouter un commentaire
Articles suggérés